Pas de guérison mais un rétablissement : quel rôle peuvent jouer le Manager inclusif et de son équipe ?
1. Origine et définition du rétablissement
Origine : le concept de rétablissement a émergé dans les pays anglo-saxons vers les années 1970 – 1980 dans le domaine de la santé mentale. Le mouvement du rétablissement, porté par les usagers des services psychiatriques, a commencé à prendre de l’importance à partir des années 2000, remettant en question les approches traditionnelles axées sur le diagnostic, le traitement médical et la gestion des symptômes. Aux États-Unis, des mouvements tels que celui des droits civiques des personnes atteintes de maladies mentales, ont joué un rôle important dans la promotion de la démarche de rétablissement, mettant en avant les droits des patients à participer aux décisions concernant leur traitement et à faire valoir leurs aspirations à gagner en autonomie et en qualité de vie.
Définition : William (Bill) Anthony, lui-même en situation de handicap psychique et usager de la santé mentale, dit en 1993 que le rétablissement est un « processus profondément personnel, unique, de changement des propres attitudes, valeurs, sentiments, objectifs, compétences, et/ou rôles. C’est une manière de vivre une vie satisfaisante, pleine d’espoir et épanouissante, en dépit des limites dues à la maladie. » Cette définition met l’accent sur l’adaptation et la croissance personnelle plutôt que sur la guérison complète.
2. Acteurs du rétablissement
Qui contribue au rétablissement ?
Le premier acteur est la personne concernée. Elle est au cœur du processus. Elle joue un rôle unique et central en s’engageant activement dans sa propre éducation thérapeutique, en analysant les facteurs influant son état de santé, en gérant son traitement médical et en adoptant des comportements favorables à la qualité de sa vie.
Toutefois, d’autres acteurs peuvent jouer un rôle vertueux au sein de l’entreprise. Le service de Ressources Humaines et le Référent Handicap fournissent un cadre de soutien via des aménagements raisonnables et coordonnent les efforts de sensibilisation et de formation des équipes, alignant ces actions avec les objectifs de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) et l’efficacité au travail.
Enfin, il ne faut pas négliger l’impact de l’entourage professionnel de proximité : Manager et collègues. Leur rôle est essentiel dans la communication quotidienne et la dynamique de groupe, en adaptant les interactions et en cultivant les bonnes pratiques pour soutenir efficacement la Personne en Situation de Handicap.
3. Impact vertueux de l’entourage professionnel inclusif
Voici des bonnes pratiquant pour aider une personne avec une maladie chronique à préserver l’équilibre de son rétablissement, éviter ou limiter ses absences pour raison médicale et maintenir une performance optimale du collectif de travail, sachant qu’une personne affaiblie est moins productive que ses collègues, cependant plus productive que si elle était absente.
Maladie de Crohn
- Description : maladie inflammatoire chronique de l’intestin caractérisée par des douleurs abdominales sévères, des diarrhées, de la fatigue et de la malnutrition.
- Aménagement raisonnable : accès à des repas adaptés, des horaires flexibles et une salle de repos.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : assurer un accès immédiat aux installations sanitaires.
- Efficience : accepter que la personne ait des objectifs de productivité beaucoup plus faibles en période de crise, lors des poussées de la maladie.
- Bien-être : apporter un support émotionnel constant, faire preuve de compréhension par rapport à la nature imprévisible de la maladie et aux besoins spécifiques en matière d’alimentation et de repos.
Sclérose en Plaques (SEP)
- Description : maladie neurologique avec des symptômes variables incluant la fatigue, les troubles de la mobilité et des altérations cognitives.
- Aménagement raisonnable : équipement du poste de travail en matériels ergonomiques, horaires modulables ; accès à une salle de repos ; formation de l’entourage aux gestes de Premiers Secours ; télétravail lors de poussées symptomatiques.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : prévenir les risques de chute, assister en cas de chute ou de malaise.
- Efficience : accepter que la personne choisisse ses horaires en fonction de l’énergie que lui laisse la maladie.
- Bien-être : encourager la personne à faire des pauses régulières et à se détendre en salle de repos.
Fibromyalgie
- Description : syndrome caractérisé par des douleurs musculosquelettiques diffuses, de la fatigue et des troubles du sommeil.
- Aménagement raisonnable : mise en place de pauses fréquentes et accès à une salle de repos.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : éviter à la personne les efforts physiques intenses qui peuvent aggraver la maladie.
- Efficience : accepter que la personne ait des objectifs de productivité beaucoup plus faibles durant les périodes de forte douleur.
- Bien-être : offrir un soutien psychologique régulier.
Troubles dépressifs
- Description : les troubles dépressifs se caractérisent par une humeur constamment triste, une perte d’intérêt et de plaisir, des sentiments de culpabilité ou une faible estime de soi, des troubles du sommeil ou de l’appétit, une concentration défaillante et une faible énergie.
- Aménagement raisonnable : adaptation de la charge de travail, prévention du stress, service de soutien psychologique ou ligne d’écoute psychologique anonyme, formation de l’équipe aux Premiers Secours en Santé Mentale.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : détecter les signaux faibles de détérioration de l’humeur de la personne et faire un signalement pour anticiper une dégradation de la situation.
- Efficience : accepter que la personne ait des objectifs réduits ou dispose de délais flexibles lors des phases de faible énergie.
- Bien-être : maintenir une communication positive pour aider la personne à dépasser les biais cognitifs propres à la dépression comme le pessimisme systématique ; encourager constamment, apporter un soutien pour maintenir l’estime de soi et la motivation, valoriser tous les succès ou progrès, y compris les plus modestes.
Troubles bipolaires
- Description : les troubles bipolaires impliquent des changements significatifs d’humeur, allant de périodes maniaques (énergie extrême, comportement impulsif) à des épisodes dépressifs.
- Aménagement raisonnable : adaptation de la charge de travail, flexibilité des horaires par rapport aux effets secondaires du traitement médicamenteux ; mise en place d’un protocole avec la personne concernée et le médecin du travail pour savoir comment réagir en cas de crise (contacter la famille, appeler le SAMU…) ; formation de l’équipe aux Premiers Secours en Santé Mentale.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : détecter les signaux faibles de détérioration de l’humeur – signes avant-coureurs de comportement maniaque ou dépressif – et faire un signalement pour anticiper une dégradation de la situation.
- Efficience : utiliser des rappels et des supports pour aider à maintenir l’organisation et la concentration pendant les phases maniaques ou dépressives.
- Bien-être : apporter un soutien pour maintenir l’estime de soi et la motivation dans les phases de dépression.
Troubles anxieux
- Description : les troubles anxieux sont caractérisés par une anxiété persistante et excessive, difficile à contrôler, affectant les capacités et perturbant fortement la vie quotidienne.
- Aménagement raisonnable : travail structuré ; espaces de travail calmes et sécurisés ; salle de repos pour la gestion de l’anxiété aiguë ; formation de l’équipe aux Premiers Secours en Santé Mentale.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : détecter les signaux faibles de détérioration de l’attitude ou du comportement et faire un signalement pour anticiper une dégradation de la situation
- Efficience : permettre des pauses fréquentes, encourager à aller en salle de repos en cas de signes de crise d’angoisse.
- Bien-être : éviter les stimuli anxiogènes, les imprévus, les « surprises ».
Troubles schizophréniques
- Description : les troubles schizophréniques sont complexes. Ils incluent des hallucinations, des délires, des perturbations de la pensée et une faible concentration, impactant significativement la vie quotidienne.
- Aménagement raisonnable : adaptation de la charge de travail, flexibilité des horaires par rapport aux effets secondaires du traitement médicamenteux ; mise en place d’un protocole avec la personne concernée et le médecin du travail pour savoir comment réagir en cas de crise (contacter la famille, appeler le SAMU…) ; formation de l’équipe aux Premiers Secours en Santé Mentale.
- Rôle des collègues :
- Sécurité : détecter les signaux faibles de détérioration de l’attitude (apparence négligée, hygiène douteuse…) ou du comportement (« bizarreries » …) et faire un signalement pour anticiper une dégradation de la situation
- Efficience : offrir un cadre de travail structuré pour réduire la confusion et les malentendus ; apporter une aide constante ou une supervision pour structurer les tâches et les responsabilités.
- Bien-être : utiliser des stratégies de communication claire et des routines prévisibles pour réduire le stress et favoriser une meilleure intégration sociale.
L’entourage professionnel de proximité, en prenant en compte les besoins individuels des personnes atteintes de maladie chronique, contribuent à l’équilibre du rétablissement, évitent ou réduisent les absences pour raison médicale et ainsi conjuguent les enjeux d’inclusion de l’entreprise et la performance au travail.