Concilier son rôle de Référent Handicap avec ses autres responsabilités peut représenter une difficulté significative. La mission de Référent Handicap vient souvent en complément d’un poste existant, ce qui entraîne une gestion fine des priorités et des attentes des multiples parties prenantes.
Un rôle complexe à la croisée d’attentes divergentes
La Direction, par exemple, cherche à développer une politique d’inclusion ambitieuse tout en s’assurant qu’elle s’aligne sur les objectifs économiques, tels que la maîtrise des coûts et le retour sur investissement. Les Managers, quant à eux, peuvent percevoir l’intégration d’un collaborateur handicapé comme un défi organisationnel, craignant que les ajustements nécessaires affectent la productivité de l’équipe. Les Responsables RH doivent jongler entre le respect des obligations légales et la satisfaction des attentes de toutes les parties. Le Médecin du travail se concentre sur les aspects médicaux et ergonomiques, tandis que la Personne en Situation de Handicap souhaite à la fois une prise en compte de ses besoins spécifiques et une reconnaissance équitable de ses compétences.
Cette analyse met en lumière la complexité des enjeux et le risque que le Référent Handicap se retrouve paralysé entre tous les intérêts divergents potentiels. En ajoutant le manque de temps, la mission est assurée de tomber rapidement dans l’oubli. D’où la nécessité pour le Référent Handicap d’adopter une posture professionnelle qui favorise la communication, l’alignement des intérêts, et une collaboration étroite avec tous les acteurs impliqués.
Pour naviguer dans ce contexte complexe, il est crucial que le Référent Handicap :
- Établisse une communication claire avec toutes les parties prenantes pour comprendre et aligner leurs attentes. Il doit œuvrer pour favoriser l’entente et l’efficacité, réduisant les malentendus et renforçant la coopération. Sans cela, des tensions et des incompréhensions peuvent survenir, entravant les initiatives d’inclusion.
- Sollicite le soutien de la Direction pour obtenir les ressources et l’appui nécessaires, essentiels pour l’accomplissement de ses missions. Sans ce soutien, le Référent Handicap pourrait se heurter à des obstacles insurmontables faute de moyens.
- Priorise ses missions pour dédier suffisamment de temps aux enjeux du handicap. Il assure une gestion efficace du temps, concentrant l’effort sur les actions à impact élevé. L’absence de priorisation peut mener à un éparpillement et à une moindre efficacité des actions entreprises.
- Développe un réseau de relais dans l’entreprise pour partager certaines tâches et mobiliser des compétences diverses, allégeant sa charge de travail. Ce réseau devient un atout essentiel, à la fois pour se libérer du temps, et aussi pour que la politique handicap s’infiltre à tous les niveaux de l’entreprise, jusqu’à faire partie de son ADN.
Une priorisation qui dépend du contexte
Pour éviter de se disperser, il est essentiel que le Référent Handicap adapte son action aux spécificités de l’entreprise :
- Dans une grande entreprise, où une politique structurée existe déjà, le Référent Handicap peut se concentrer sur des initiatives ciblées comme le recrutement et l’appui aux Managers.
- Dans une PME ou une TPE, où les ressources sont limitées, il est préférable de prioriser le maintien dans l’emploi et la prévention de la désinsertion professionnelle si le taux d’emploi de Travailleurs Handicapés approche ou dépasse les 6%. En revanche, si le taux d’emploi est faible, il semble plus judicieux de privilégier le recrutement de Travailleurs Handicapés ou d’accompagner les salariés et agents qui auraient intérêt à faire une Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH).
- Dans une entreprise avec une contribution financière élevée mais sans marge de manoeuvre au niveau du recrutement, la communication sur la RQTH et la recherche de fournisseurs dans le secteur protégé et adapté sont des options possibles.
- Dans une entreprise comptant peu de Travailleurs Handicapés, il est pertinent de poser les bases d’une stratégie globale et de planifier les actions dans le temps, en commençant par celles ayant le plus d’impact à court terme.
L’objectif n’est pas d’aborder tous les axes simultanément, mais de structurer les priorités pour avancer pas à pas, en réservant les initiatives moins urgentes pour plus tard.
Quelques clés pour gérer les contraintes de temps et de ressources
Déployer des outils numériques adaptés peut représenter un levier important. Un logiciel de gestion des missions ou une plateforme collaborative permet de centraliser les informations, de suivre les projets en cours et de prioriser les actions.
En parallèle, la formation continue est cruciale. Participer à des ateliers, séminaires ou groupes de travail sur l’inclusion aide le Référent Handicap à se tenir informé des évolutions légales et des bonnes pratiques. C’est un objectif facile à atteindre en intégrant le réseau des Référents Handicap de l’AGEFIPH ou du FIPHFP.
Sur le plan humain, il est essentiel de considérer les impacts émotionnels et personnels. La gestion du stress et la prévention de l’épuisement professionnel peuvent inclure la participation à des réseaux de pairs, où le Référent Handicap peut échanger sur ses difficultés et trouver des solutions communes.
Enfin, la sensibilisation globale de l’ensemble des collaborateurs est un axe clé. Organiser des campagnes de sensibilisation au handicap contribue à réduire les stéréotypes, favorisant une culture d’entreprise inclusive et facilitant la tâche du Référent Handicap.
Une mission évolutive
Le rôle du Référent Handicap peut également évoluer avec le temps. Dans un premier temps, le focus peut être mis sur le pilotage et la sensibilisation interne relative au maintien dans l’emploi ou au recrutement en fonction du contexte. L’objectif est de créer un socle culturel inclusif. Une fois ce socle établi, les efforts peuvent s’étendre aux autres axes, y compris à la mise en place de partenariats avec le secteur protégé et adapté, ou encore au développement d’une stratégie de communication externe.
Il est aussi important de tenir compte des soutiens disponibles : développer un réseau interne avec des relais parmi les managers ou les collaborateurs peut alléger la charge du Référent Handicap. De même, l’appui de partenaires externes (AGEFIPH, FIPHFP, Cap Emploi) permet de gagner en efficacité.
La charge de travail associée au rôle de Référent Handicap doit également être relativisée en fonction de la taille de l’entreprise et du nombre de Travailleurs Handicapés en poste. Une entreprise de 50 salariés aura naturellement des besoins différents d’une organisation de 5 000 employés. L’implication nécessaire pour chaque axe peut être modulée en conséquence, permettant au Référent Handicap de remplir son rôle sans épuisement.Conclusion
Avec une approche stratégique et collaborative, le Référent Handicap peut non seulement surmonter les contraintes de temps et de ressources, mais aussi maximiser son impact en insufflant une véritable dynamique inclusive à l’ensemble de l’organisation.
Le premier pas est de se présenter en tant que Référent Handicap : c’est l’objet d’un autre article.